lundi 19 septembre 2011

Vendredi 19 septembre : l'unique Juif parmi ces circoncis


Message électronique de Dory. Une revue française veut publier des traductions de ses poèmes. Il me demande s’il peut donner ma traduction de Rencontre avec Sutzkever et me prie de relire ses propres traductions de deux autres poèmes, dont :

Minorité (Juif)

Ô pays dont tous les poètes sont, au mieux,
Des hétéros ! (Sauf un salaud qui bat ses femmes) –
Il y a deux ans, sans pleurs ni confetti d’adieu,
J’ai extirpé à ton champ de mines mon âme,

Et je suis retourné en Europe. Sans doute
Était-ce un trait fatal de mon angoisse innée ;
Car je voulais aimer ; j’y aspirais de toutes
Mes forces ; mais mon cœur, on l’avait tant miné.

… Et me voilà, Cyril, qui aime. Tu m’entends ?
J’étais l’unique Juif parmi ces circoncis.
Ce pays va mourir, il est agonisant,

Mais nous avons Berlin, Paris et Rome ! Assis
Au bord des fleuves de nos spermes généreux,
Noyons l’exil ! (Et tout le reste est de l’hébreu).

J’aime particulièrement le vers qui dit tout de l’exil intérieur que Dory ressent :
J’étais l’unique Juif parmi ces circoncis.


En exergue du poème, ces vers tirés de Amour, d’Uri-Zvi :
Tant mieux, nous lâchons Londres, New York, Paris,
Tant mieux, nous quittons l’Europe et son vernis
Et rejoignons la secte des galapiats, des enfiévrés

Qui susurrent leur amour aux dunes et aux rochers

De Canaan.